Régis François, président de l’ASBL BeProsumer, a ouvert sa présentation en rappelant la mission de l’association, qui représente et défend les propriétaires particuliers de panneaux photovoltaïques en Wallonie. BeProsumer, avec ses 32 800 membres depuis 2013, est l’une des plus grandes ASBL de Wallonie en dehors du secteur sportif. L’association se concentre uniquement sur les particuliers, sans inclure les professionnels, et refuse toute forme de subside pour préserver son indépendance.
Principaux dossiers défendus par BeProsumer
1. Certificats Verts :
Régis François a évoqué l’action en justice concernant les certificats verts, un litige en cours depuis 13 ans, avec 19 000 requérants. La Cour d’appel de Liège ayant rejeté leur requête, l’affaire est désormais devant la Cour de cassation. L’enjeu est de faire reconnaître des erreurs de motivation dans les décisions antérieures.
2. Recours de Zuhal Demir sur le compteur qui tourne à l’envers :
La ministre flamande de l’Énergie, Zuhal Demir, a déposé un recours contre la décision du gouvernement wallon de prolonger le système du compteur qui tourne à l’envers jusqu’en 2030. Régis François a averti que ce recours pourrait aboutir, ce qui constituerait un risque important pour les prosumers wallons.
3. Accélération du déploiement des compteurs communicants :
BeProsumer surveille de près l’initiative d’ORES visant à accélérer l’installation des compteurs communicants. Régis a personnellement installé un compteur communicant et n’a rencontré aucun problème de fonctionnement. Il a insisté sur le fait que l’installation de ces compteurs ne remet pas en question le principe du compteur qui tourne à l’envers, tant que le recours de Zuhal Demir n’aboutit pas.
4. Revente de l’énergie excédentaire :
Régis a évoqué la possibilité pour les prosumers de revendre leur surplus d’énergie. Cependant, avec des prix d’achat très bas (5 centimes par kWh) et des frais supplémentaires pour participer à ce système (150 € chez Engie), il a conseillé de maintenir le compteur qui tourne à l’envers tant que possible, car cela reste plus avantageux pour les prosumers.
5. Décrochages d’onduleurs :
Un des problèmes récurrents est le décrochage des onduleurs dû à des surtensions sur le réseau. Régis a souligné que cette problématique, bien que complexe, nécessite un travail de fond. Il a encouragé l’utilisation de dongles connectés aux compteurs pour surveiller les décrochages et, à terme, obtenir une indemnisation des heures de décrochage.
6. Stockage de l’énergie :
Régis a abordé le sujet du stockage de l’électricité, précisant que les solutions permettant de stocker de l’énergie pour des périodes saisonnières restent très coûteuses. Toutefois, il a mis en avant l’intérêt des batteries pour maximiser l’autoconsommation et aider le réseau, tout en rappelant que les prosumers doivent être rémunérés pour toute contribution au bien public.
7. Nouvelle méthodologie tarifaire à partir de 2026 :
Il a expliqué que la nouvelle méthodologie tarifaire incitative qui entrera en vigueur en 2026 ne sera pas obligatoire. Elle pourrait encourager les propriétaires de véhicules électriques et de batteries à ajuster leur consommation d’énergie en fonction des heures creuses et des pics de production solaire.
8. Communautés d’énergie :
Régis a également mentionné le développement des communautés d’énergie, qui permettent aux habitants d’un même quartier de partager l’électricité. Cependant, il a regretté la complexité juridique de ces initiatives, qui freine leur mise en œuvre.
La présentation s’est conclue par un rappel de l’importance de l’autoconsommation et des petits gestes au quotidien, tout en mettant en lumière les défis techniques liés aux décrochages d’onduleurs et aux surtensions. Régis François a insisté sur l’importance de rester vigilant face aux changements à venir, notamment en ce qui concerne le recours de Zuhal Demir et l’évolution des compteurs communicants.
Nicolas Favresse, Directeur d’ORES pour le Brabant Wallon, a abordé la problématique des décrochages d’onduleurs en rappelant des concepts fondamentaux d’électricité, comme la loi d’Ohm (U = R x I). Il a expliqué que les onduleurs sont conçus pour injecter des électrons verts sur le réseau, mais que la résistance du réseau varie selon des facteurs comme la distance de la cabine électrique, la nature des câbles et leur section. Ces éléments déterminent la capacité du réseau à accepter ces électrons sans provoquer une surtension.
Le phénomène des décrochages d’onduleurs
Nicolas a précisé que les onduleurs sont programmés pour se protéger en cas de surtension, en particulier lorsque la tension atteint 253 volts pendant plus de 10 minutes, ou 263,5 volts instantanément. Ce fonctionnement de sécurité, bien que frustrant pour les prosumers, est un signe que l’onduleur fonctionne correctement, en protégeant non seulement l’installation du prosumer, mais également les appareils des voisins.
Cependant, il a souligné que l’autoconsommation et l’utilisation d’une voiture électrique peuvent aider à réduire la tension sur le réseau. Brancher une voiture électrique pendant les heures solaires, par exemple, permet de consommer les électrons verts produits par les panneaux solaires, abaissant ainsi la tension.
Les défis du réseau face à l’augmentation des installations photovoltaïques
Nicolas Favresse a expliqué qu’entre 2022 et 2023, le nombre d’installations photovoltaïques en Wallonie a augmenté de 60 %, passant de 180 000 à 287 000 installations. Cette augmentation équivaut à ajouter deux réacteurs nucléaires directement sur le réseau basse tension, conçu à l’origine comme une « route de campagne » plutôt que comme une « autoroute ». Il a également mentionné que le déploiement des panneaux photovoltaïques est difficilement planifiable, car ORES n’est informé qu’après l’installation.
Il a aussi reconnu que le déploiement des compteurs communicants en Wallonie a pris du retard par rapport à d’autres régions et pays. Ces compteurs sont essentiels pour permettre à ORES de diagnostiquer les problèmes de tension en temps réel. Sans ces compteurs, ORES reste aveugle face aux décrochages.
Gestion des plaintes et efforts de transparence
ORES a pris des mesures pour être transparent sur la situation, en publiant une cartographie des zones affectées par les décrochages. Les zones rouges indiquent les secteurs prioritaires nécessitant des investissements urgents, tandis que les zones mauves représentent celles où des interventions sont planifiées pour les prochaines années. ORES a également mis en place un processus permettant aux prosumers de signaler un décrochage via un formulaire en ligne.
En 2024, ORES prévoit de travailler sur 1 250 circuits affectés, mais Nicolas Favresse a précisé que résoudre l’ensemble des plaintes pourrait prendre jusqu’à sept ans, compte tenu des 11 000 plaintes photovoltaïques déjà enregistrées.
Solutions envisagées et responsabilités partagées
Nicolas a mentionné plusieurs solutions pour réduire les décrochages, comme l’optimisation des phases et le rééquilibrage du réseau en ajoutant de nouveaux câbles et transformateurs. Toutefois, il a également insisté sur l’importance de la contribution des prosumers eux-mêmes. Il les a encouragés à adapter leurs habitudes de consommation, notamment en autoconsommant pendant les heures solaires et en branchant leurs voitures électriques durant cette période pour alléger la tension sur le réseau.
Enfin, il a rappelé que la modernisation du réseau nécessitera de lourds investissements, comme la pose de milliers de kilomètres de câbles et l’installation de nouvelles cabines électriques, mais que cela prendra du temps en raison des contraintes administratives et logistiques.
Question :
Quand est-ce qu’ORES passera du triphasé 230 volts au triphasé 380 volts (ou tétraphasé 400 volts), sachant qu’une partie du Brabant Wallon est encore en triphasé 230 volts, ce qui pose des problèmes sur le réseau ?
Réponse de Nicolas Favresse :
Nicolas a commencé par rappeler que la norme de 400 volts (ou triphasé 380/400 volts) est déjà largement adoptée dans la plupart des pays européens. Toutefois, la Belgique, et plus spécifiquement la Wallonie, avait historiquement choisi de se baser sur du 230 volts triphasé, une décision qui remonte à plusieurs décennies. Il a également souligné qu’augmenter la tension permet de faire passer plus de puissance, ce qui peut sembler une solution logique.
Cependant, il a précisé que convertir l’ensemble du réseau de 230 à 400 volts impliquerait des coûts financiers et en termes de temps qui seraient phénoménaux. Le réseau électrique belge a été construit sur près d’un siècle, et remplacer toutes les infrastructures existantes nécessiterait de repartir de zéro. Nicolas a estimé que cela prendrait bien plus que les 7 ans déjà envisagés pour résoudre les autres problèmes du réseau, et que cela mobiliserait des ressources financières colossales que les moyens actuels ne permettent pas de couvrir.
En ce qui concerne les clients particuliers, il a expliqué que le passage de monophasé à tétraphasé (400 volts) ne pose aucun problème technique, bien qu’il soit recommandé de consulter un électricien. Toutefois, pour les clients raccordés en triphasé 230 volts, comme ceux qui possèdent des équipements spécifiques (machines agricoles, équipements industriels, etc.), la conversion vers le 400 volts pourrait poser des difficultés majeures, et des coûts importants seraient à prévoir.
La question cruciale est donc de savoir qui devrait supporter ces coûts de conversion. Si ORES devait prendre en charge la conversion de chaque installation de 230 volts à 400 volts, y compris pour les particuliers et les petits indépendants, le coût serait tout simplement exorbitant. C’est pourquoi, bien que le 400 volts se développe progressivement, notamment dans les nouvelles constructions ou les demandes d’augmentation de puissance, il ne sera pas possible de le généraliser à court terme. Un déploiement généralisé chez tous les utilisateurs en l’espace de 7 ans n’est ni financièrement faisable ni souhaitable pour le moment.
Question :
Le public a exprimé une frustration concernant le sous-investissement historique dans les infrastructures électriques, notamment par les anciennes intercommunales. La personne a évoqué que, selon elle, ORES et les intercommunales n’ont pas suffisamment investi dans le réseau au fil des années, préférant prendre l’argent plutôt que d’améliorer les infrastructures. Elle a également soulevé la question des décrochages fréquents dans son installation photovoltaïque et a souligné que la taxe prosumer ainsi que les éventuelles augmentations tarifaires pèsent sur les propriétaires de panneaux photovoltaïques, qui se retrouvent à payer pour la mise à niveau du réseau. Enfin, la personne a exprimé des doutes quant à la capacité d’ORES à résoudre les problèmes dans un délai de sept ans, notamment avec l’augmentation continue des nouvelles installations.
Réponse de Nicolas Favresse :
Nicolas a d’abord remercié l’intervenant pour avoir déposé une plainte via le site internet d’ORES, rappelant l’importance de centraliser les plaintes pour un traitement efficace. Il a expliqué que les 11 000 plaintes reçues à ce jour sont classées par ordre de priorité, en fonction du nombre de clients impactés et de la gravité des problèmes. Il a insisté sur le fait que répéter une plainte n’accélère pas le processus et que chaque plainte sera traitée en temps voulu.
Concernant le rôle des intercommunales, Nicolas a voulu dissiper l’idée que celles-ci « prenaient l’argent ». Il a expliqué que les intercommunales sont détenues à 100 % par les communes, et que les éventuels bénéfices sont redistribués sous forme de dividendes aux communes, réduisant ainsi la pression fiscale locale. Il a réfuté toute théorie de complot selon laquelle les intercommunales auraient amassé des trésors de guerre, affirmant que celles-ci fonctionnent à prix coûtant.
En ce qui concerne le retard dans les investissements, Nicolas a admis que des améliorations auraient pu être apportées plus tôt, mais a souligné que personne n’aurait pu anticiper des crises comme la pandémie de COVID-19 ou la guerre en Ukraine, qui ont considérablement perturbé l’économie et la planification des infrastructures. Il a précisé qu’entre 2019 et 2023, ORES a augmenté ses investissements de 65 % pour tenter de répondre aux besoins croissants, mais il a également rappelé que le réseau s’est construit progressivement sur plus d’un siècle. Le défi actuel, avec l’essor des installations photovoltaïques et la transition énergétique, a renversé le modèle centralisé traditionnel, rendant les ajustements beaucoup plus complexes.
Nicolas a conclu en rappelant que la transition énergétique en cours est un processus positif pour l’environnement, mais que cela nécessite du temps pour que le réseau puisse s’adapter. Il a également souligné que les clients doivent eux aussi adapter leurs habitudes de consommation, en adoptant des pratiques telles que l’autoconsommation en journée (par exemple, en lançant des appareils électroménagers comme le lave-vaisselle pendant les heures solaires), pour aider à soulager la pression sur le réseau.
Question du public sur les cadastres des phases et les compteurs communicants - Réponse de Nicolas Favresse (ORES)
Première question :
Patrick, habitant de Mélin, a soulevé plusieurs questions techniques liées à l’absence de cadastre des phases avant l’installation des panneaux photovoltaïques chez les particuliers. Il a proposé de commencer à établir ce cadastre maintenant, suggérant que le rééquilibrage des phases, qui pourrait se résoudre avec un simple changement de phase, est une opération relativement simple et rapide. Il a également exprimé son mécontentement concernant le manque de suivi sur les plaintes déposées, mentionnant l’absence de confirmation par email. Enfin, il a questionné la vérification de la production et de la consommation d’électricité pour ceux qui bénéficient encore d’un compteur qui tourne à l’envers.
Réponse de Nicolas Favresse :
Nicolas a confirmé que le rééquilibrage des phases est bien une solution envisagée par ORES, et qu’elle fait partie des interventions rapides qu’ils peuvent réaliser lorsque c’est possible. Il a précisé que cela fait partie des “solutions rapides” qu’il avait mentionnées dans sa présentation, comme baisser la tension en cabine ou placer des compensateurs de neutre. Ces interventions, qui peuvent prendre une demi-heure, peuvent parfois résoudre le problème.
Cependant, il a souligné que ces interventions ne sont pas efficaces partout. La gravité de la situation, notamment la différence de charge entre les phases, détermine si une solution simple est applicable ou non. Si le problème est plus complexe, d’autres interventions plus coûteuses et chronophages, comme l’ajout de cabines ou le remplacement de câbles, peuvent être nécessaires.
En ce qui concerne le cadastre des phases, Nicolas a expliqué qu’ORES n’a actuellement pas la capacité de savoir sur quelle phase chaque habitation est connectée. Les électriciens qui installent les onduleurs ne spécifient pas nécessairement quelle phase est utilisée. La seule manière de le savoir avec certitude est d’utiliser un compteur communicant, qui permettrait à ORES de déterminer sur quelle phase chaque client est raccordé. Nicolas a mentionné que des sociétés suisses et françaises ont déjà développé des logiciels capables de créer un cadastre des phases, mais ces outils nécessitent une concentration importante de compteurs communicants pour être efficaces (80 à 90 % de déploiement). ORES n’a donc pas encore les moyens techniques pour établir ce cadastre à grande échelle.
Intervention de suivi du public :
Patrick a ensuite interpellé Nicolas en demandant si, avec le déploiement massif des compteurs intelligents, il ne serait pas possible de résoudre les problèmes de décrochage bien plus rapidement que dans les 7 ans prévus. Il a suggéré que si les compteurs communicants permettaient de créer un cadastre des phases, cela pourrait considérablement accélérer la résolution des problèmes.
Réponse de Nicolas Favresse :
Nicolas a nuancé cette hypothèse. Bien que le compteur communicant soit indispensable pour résoudre un grand nombre de problèmes et pour créer un cadastre des phases, il ne constitue pas une solution miracle dans tous les cas. Le rééquilibrage des phases ne fonctionne que lorsque certaines phases sont sous-utilisées et d’autres surchargées. Si toutes les phases sont déjà utilisées à leur pleine capacité, ce rééquilibrage ne sera pas efficace.
Il a également expliqué que certaines portions du réseau basse tension, notamment celles s’étendant sur 900 mètres à 1 kilomètre, ne peuvent plus fonctionner correctement avec la transition énergétique actuelle. Les réseaux de cette longueur, surtout en 230 volts, ne peuvent pas supporter l’injection supplémentaire d’énergie provenant des panneaux photovoltaïques. Passer à un réseau 400 volts permettrait de doubler la longueur à 400 mètres, mais cela implique la construction de nouvelles cabines, la pose de nouveaux câbles et d’importants travaux d’infrastructure.
Pour conclure, Nicolas a confirmé que le rééquilibrage des phases est privilégié lorsqu’il est applicable, car c’est la solution la plus rapide et la moins coûteuse. Toutefois, dans de nombreux cas, des solutions plus complexes, comme la construction de nouvelles cabines, seront nécessaires pour garantir la stabilité du réseau.
Question du public sur la réduction de la période d’octroi des certificats verts pour les prosumers Solwatt - Réponse de Nicolas Favresse (ORES) et Régis François (BeProsumer)
Contexte :
La question posée portait sur la réduction de la période d’octroi des certificats verts pour les prosumers du programme Solwatt, qui devaient initialement bénéficier de certificats verts pendant 15 ans, mais ont vu cette période réduite à 10 ans par décision politique. L’intervenant a exprimé son mécontentement quant à cette modification et a soulevé des questions sur la légitimité de cette décision politique.
Réponse de Nicolas Favresse (ORES) :
Nicolas a rapidement expliqué qu’ORES n’avait pas de rôle décisionnel dans cette affaire. La réduction de la durée des certificats verts est une décision purement politique, et ORES se limite à exécuter les directives décidées par les autorités. Il a souligné qu’ORES ne s’implique pas dans les choix politiques concernant les certificats verts.
Réponse de Régis François (BeProsumer) :
Régis François a approfondi la réponse en rappelant que cette réduction est une problématique que BeProsumer a dénoncée à de nombreuses reprises. Il a expliqué que les gestionnaires de réseau, tels qu’ORES, fonctionnent avec des budgets validés par le régulateur wallon (CWaPE), et qu’ils sont tenus de justifier chaque dépense. Il a cependant souligné que les décisions sur les certificats verts et les réductions relèvent de choix politiques, et non des gestionnaires de réseau.
Il a rappelé que la réduction des certificats verts de 15 ans à 10 ans a été une source majeure de frustration pour les prosumers, qui ont vu leurs droits modifiés de manière rétroactive. BeProsumer a dû intenter des actions en justice pour défendre les droits des prosumers, notamment pour contester cette décision politique. Régis a exprimé son soutien à l’idée que les prosumers, qui subissent des pertes de production dues aux décrochages, devraient être indemnisés proportionnellement.
Régis a ensuite partagé une anecdote sur une proposition faite par BeProsumer fin 2023 au ministre Philippe Henry, qui visait à déployer le Dongle P1 OpenWatt à grande échelle. Cette solution technologique aurait permis de mesurer précisément les décrochages des onduleurs et d’indemniser de manière juste les prosumers affectés, tout en évitant d’indemniser ceux qui n’ont pas de problème.
L’anecdote a pris un tournant surréaliste lorsque Régis François a raconté une conversation qu’il a eue avec le cabinet du ministre Henry : « Quand le ministre Henry s’est aperçu que cet appareil pouvait également être utilisé de manière préventive, c’est-à-dire pour les personnes qui n’ont pas encore de panneaux mais qui souhaitent en installer et vérifier si le réseau est en surtension, cela l’a rebuté. Il a expliqué que certains candidats à l’installation de panneaux pourraient renoncer à leur projet en voyant la surtension sur le réseau. Cela aurait un impact négatif sur le nombre de mètres carrés d’énergie renouvelable installée en Wallonie, compromettant ainsi les objectifs statistiques et les quotas. »
Régis François a qualifié cette situation d’ubuesque, en soulignant qu’une solution technique viable avait été déclinée pour préserver des objectifs politiques de court terme, au détriment de la fiabilité du réseau et des intérêts des prosumers.
Question du public à Koen Bosmans, avec réactions d’ORES
Contexte :
La question initiale était posée à Koen Bosmans, entrepreneur et lauréat du trophée “Incident” pour son approche éco-innovante, notamment grâce à une installation photovoltaïque qui permet de torréfier du café à partir de l’énergie solaire. La question portait sur ses expériences d’investissement et sur les difficultés rencontrées dans le cadre de l’agrivoltaïsme et de l’intégration de panneaux solaires dans un contexte industriel. Elle visait à recueillir son point de vue en tant qu’entrepreneur sur les défis liés à l’infrastructure énergétique.
Première intervention de Koen Bosmans :
Koen a partagé son expérience en matière d’investissement dans l’énergie solaire, expliquant que la stabilité des règles est essentielle pour un entrepreneur. Il a critiqué les changements fréquents des règles en cours de jeu, rendant la planification à long terme difficile, non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les banques qui financent ces projets.
Il a ensuite évoqué l’exemple de son installation photovoltaïque à Mélin, où il a dû payer lui-même l’extension de la connexion au réseau. Cette extension a nécessité l’installation d’un câble à plus grande section, ce qui a représenté un coût élevé pour son entreprise. De plus, il a souligné qu’il n’y avait pas de concurrence dans le secteur pour réaliser ces travaux, ORES étant le seul opérateur habilité à le faire. Cela a rendu le processus coûteux et limité les options pour une petite entreprise comme la sienne, qui aurait préféré une connexion plus puissante mais n’en avait pas les moyens financiers.
Koen a conclu en insistant sur l’importance de la prévisibilité des règles pour les investissements à long terme, en particulier dans le secteur des énergies renouvelables.
Réaction d’ORES (Nicolas Favresse) :
Nicolas Favresse, représentant d’ORES, a reconnu que les règles changeantes sont souvent d’origine politique et échappent à leur contrôle. En ce qui concerne les prix des travaux, il a expliqué que ceux-ci sont régulés par la CWaPE, le régulateur wallon, et basés sur les coûts moyens des années précédentes. Il a ajouté que la hausse des prix, notamment des transformateurs et des câbles, s’explique en partie par la guerre en Ukraine, qui a provoqué une augmentation des coûts des matériaux, en particulier ceux produits en Ukraine.
Il a précisé qu’ORES n’a pas de concurrence sur ce type de travaux en raison du modèle actuel, mais que cela pourrait être différent dans un autre secteur comme les télécommunications, où plusieurs opérateurs partagent les infrastructures. Toutefois, dans le domaine de l’électricité, il a expliqué que creuser plusieurs fois la même rue pour installer des câbles avec différents opérateurs augmenterait les coûts et les nuisances.
Réaction de Koen Bosmans :
Koen a réagi en insistant sur le fait que les entreprises devraient avoir la possibilité de choisir l’entreprise qui réalise les travaux d’infrastructure, comme la pose de câbles, plutôt que d’être obligées de passer par ORES. Il a proposé que les clients puissent faire appel à des entrepreneurs indépendants pour creuser les tranchées et poser les câbles, ORES intervenant ensuite uniquement pour raccorder ces câbles au réseau.
Cette approche, selon lui, permettrait plus de concurrence et donnerait aux entreprises une plus grande marge de manœuvre pour choisir les solutions les plus adaptées à leurs besoins, en évitant les coûts monopolistiques imposés par un seul opérateur.
Réponse finale d’ORES (Nicolas Favresse) :
Nicolas a répondu en expliquant que, bien qu’ORES fonctionne déjà avec des appels d’offres pour la réalisation de travaux dans le cadre des marchés publics, cela ne s’applique qu’à ORES lui-même. Il a également souligné qu’il existe des contraintes légales liées à la gestion des infrastructures publiques, notamment à cause des risques de sécurité et des normes strictes sur les travaux en domaine public.
Il a mentionné des exemples, comme le drame de Ghislenghien, pour justifier que la pose de câbles et d’infrastructures sur le domaine public doit rester sous le contrôle d’un gestionnaire unique, pour éviter les risques liés à la multiplication des acteurs sur le même site. Cela permet également d’assurer une traçabilité des infrastructures, évitant ainsi des complications si plusieurs entreprises installent des câbles dans le même endroit.
Enfin, il a conclu en affirmant que, bien que la concurrence puisse fonctionner dans certains secteurs comme les télécommunications, il n’est pas certain que cela soit la solution idéale dans le domaine de l’électricité, où des normes strictes et des contraintes de sécurité rendent la gestion centralisée plus efficace.
Question du public sur le service client et la gestion des plaintes chez ORES
Contexte :
La question portait sur l’efficacité du service client d’ORES et le délai de réponse aux plaintes. Le public a exprimé des préoccupations quant à la lenteur et au manque de personnalisation des réponses, en suggérant qu’il devrait y avoir une obligation de répondre aux plaintes dans des délais raisonnables.
Réponse d’ORES (Nicolas Favresse) :
Nicolas a reconnu que la gestion des plaintes est un défi important pour ORES, surtout en situation de crise comme celle que l’entreprise traverse actuellement avec plus de 11 000 plaintes en attente. Il a souligné que bien qu’ORES accorde une grande importance à ses clients et cherche à répondre aux plaintes, la crise actuelle a obligé l’entreprise à industrialiser le processus de gestion des plaintes, ce qui a déshumanisé la relation client.
Lorsque les clients introduisent une plainte, un membre du call center leur téléphone pour confirmer la réception et leur expliquer les grandes lignes de la réponse. Cependant, le courrier de réponse qui est envoyé est souvent standardisé, ce qui peut sembler sec et impersonnel aux yeux des clients. Nicolas a admis que cette approche, bien que nécessaire pour gérer un grand nombre de plaintes, peut paraître frustrante.
Il a ajouté que la personnalisation des réponses n’est pas toujours possible car cela prendrait trop de temps, ralentissant ainsi le traitement des plaintes. Il a également clarifié que ce ne sont pas les mêmes personnes qui réparent les problèmes techniques et qui répondent aux plaintes. Les solutions techniques sont souvent élaborées par des agents des bureaux d’études, et l’agent qui répond à la plainte ne peut pas toujours fournir de détails techniques approfondis.
Question du public sur les compteurs communicants et la transition énergétique
Un participant a posé deux questions en lien avec son installation de panneaux photovoltaïques et l’utilisation de son compteur communicant, ainsi que sur les défis de la transition énergétique. Voici le résumé des échanges :
Première question : Pourquoi ORES n’installe-t-il pas les compteurs communicants par quartier ou village pour optimiser les interventions, au lieu d’envoyer les techniciens d’un endroit à l’autre, causant des pertes de temps ?
Réponse de Nicolas Favresse (ORES) :
Nicolas a expliqué que la méthode de déploiement actuelle est le résultat de plusieurs faux départs dans l’installation des compteurs communicants en Wallonie, en raison de préoccupations concernant les électrosensibles et la volonté de développer un modèle belge distinct du modèle Linky français. ORES s’est retrouvé en retard sur son plan de déploiement initial.
Concernant le déploiement ponctuel actuel, il s’agit de répondre à des priorités immédiates, notamment les compteurs à budget et les prosumers, afin de remédier à des situations urgentes comme le problème des décrochages d’onduleurs. À partir de janvier prochain, ORES prévoit d’industrialiser le déploiement, notamment dans les immeubles d’appartements, et d’optimiser ces interventions.
Deuxième question : Qu’est-ce qui pose le plus de problèmes dans la transition énergétique : le réseau à haute tension comme la boucle du Hainaut ou le réseau local qui traverse les villes comme Beauchamp ?
Réponse de Nicolas Favresse (ORES) :
Nicolas a mentionné que le réseau de moyenne tension (6000 volts) est celui qui montre le plus de difficultés avec la transition énergétique. Le réseau de basse tension souffre également d’engorgement, mais c’est sur les réseaux à 6000 volts que les problèmes sont les plus fréquents. À 15 000 volts, les problèmes sont moins importants.
Quant au réseau de très haute tension géré par Elia, il connaît aussi des difficultés, notamment en raison de l’augmentation des injections d’électricité. Elia devra massivement investir dans ses lignes aériennes et postes en Wallonie, ce qui entraîne des contestations locales, notamment pour l’installation de nouveaux poteaux et infrastructures.
Régis François a développé plusieurs points cruciaux dans sa réponse concernant les défis de la transition énergétique, en particulier sur la gestion de l’électricité dans le réseau et l’impact des nouvelles technologies comme les véhicules électriques et les batteries stationnaires intelligentes.
1. Contexte de la transition énergétique et risques liés à la gestion de l’énergie :
Régis a commencé par aborder les défis croissants liés à la transition énergétique en Wallonie. Le réseau électrique, autrefois conçu pour gérer une production centralisée, doit désormais s’adapter à une production décentralisée, notamment due à l’augmentation des installations photovoltaïques. Cette transformation rapide entraîne des pressions considérables sur les infrastructures existantes, en particulier pour équilibrer la production et la consommation en temps réel. Il a souligné que le réseau n’était pas conçu pour gérer autant de production locale et que des investissements massifs sont nécessaires pour moderniser les infrastructures.
2. Nouveaux tarifs dynamiques et risques de surcharge :
Régis a ensuite soulevé un point crucial concernant les nouveaux tarifs dynamiques introduits pour mieux refléter les variations de la demande d’électricité. Ces tarifs segmentent la journée en périodes “vertes”, “oranges”, et “rouges”, avec des prix différents selon la disponibilité de l’électricité. Il a attiré l’attention sur la réduction de la période de nuit avantageuse, qui est passée de 22h-7h à 2h-7h pour les tarifs “verts”. Cette modification pourrait entraîner des surcharges sur le réseau, notamment lorsque les bornes de recharge pour véhicules électriques démarrent automatiquement la charge à 2h du matin, créant une demande massive d’électricité en quelques secondes. Cette surcharge pourrait provoquer des décrochages d’onduleurs ou des instabilités dans le réseau.
3. Gestion du réseau et décrochages des onduleurs :
Il a également mis en lumière les défis liés à la gestion de l’équilibre du réseau face à l’afflux d’électricité d’origine solaire. De nombreux prosumers rencontrent des problèmes de décrochage de leurs onduleurs à cause des surtensions. Certains installateurs peu scrupuleux proposent des “solutions miracles” pour contourner ces problèmes en modifiant les réglages des onduleurs, parfois à des tensions beaucoup trop élevées (jusqu’à 274 volts). Régis a averti que cela constitue une pratique illégale et dangereuse pour le réseau, et que cela risque d’endommager les équipements des voisins en perturbant l’équilibre des tensions locales.
4. Importance des batteries stationnaires intelligentes :
Pour Régis, une des clés pour stabiliser le réseau face à l’intermittence des énergies renouvelables réside dans l’usage de batteries stationnaires intelligentes. Contrairement aux batteries traditionnelles, qui se chargent automatiquement dès que possible, les batteries intelligentes pourraient ajuster leur charge en fonction de l’état du réseau et des besoins en temps réel. Cela permettrait d’optimiser l’autoconsommation des prosumers tout en évitant les décrochages des onduleurs. Il a suggéré que ces batteries, pilotées par les fournisseurs d’énergie plutôt que par ORES, pourraient être une solution efficace pour lisser la demande en électricité.
5. Périodes critiques de production solaire et risque de blackout :
Régis a ensuite expliqué qu’en 2024, la Wallonie pourrait connaître un nombre record de “périodes critiques” en termes de production d’électricité solaire, avec jusqu’à 250 jours de production excédentaire contre 30 à 40 jours habituellement. Cette surabondance d’énergie risque de déstabiliser le réseau, notamment au niveau d’Elia, qui gère les hautes tensions. Régis a fait référence à un communiqué de presse d’Elia datant de juin, qui mentionnait qu’en avril, la Belgique avait frôlé un blackout à cause d’une injection excessive d’électricité dans le réseau. Il a également pointé le problème des prix de l’électricité, qui deviennent parfois négatifs pendant ces périodes de surproduction, forçant les fournisseurs à payer pour évacuer l’électricité excédentaire.
6. Tarifs de déséquilibre et vigilance pour les prosumers :
Enfin, Régis a mis en garde les prosumers contre l’apparition de “tarifs de déséquilibre” sur leurs factures. Ces frais supplémentaires, appliqués par certains petits fournisseurs, sont imposés aux clients ayant des installations photovoltaïques pour compenser les déséquilibres sur le réseau causés par leur production. Régis a souligné que certains fournisseurs d’énergie, notamment les plus grands comme Engie, Luminus, et Eneco, n’appliquent pas ces frais. Cependant, il a appelé à la vigilance, car d’autres fournisseurs pourraient modifier les contrats en cours de route et introduire ces coûts supplémentaires. Il a précisé que cette pratique pourrait s’intensifier à mesure que les pressions sur le réseau augmentent.
Conclusion :
Régis a terminé en soulignant l’importance d’une collaboration entre les différents acteurs de l’énergie pour trouver des solutions durables face aux défis posés par la transition énergétique. Il a insisté sur le fait que la gestion intelligente du réseau, le développement de technologies comme les batteries stationnaires et une meilleure coordination tarifaire sont essentiels pour éviter les problèmes de surcharge, d’instabilité, et de décrochage des onduleurs à l’avenir.
Lors de la conférence, un participant a soulevé une question sur la possibilité d’utiliser des batteries collectives avant les cabines de distribution pour stocker l’excédent d’électricité produit par les panneaux photovoltaïques. L’objectif de cette question était de savoir si une telle solution pourrait aider à baisser la tension du réseau en période de production excédentaire et ainsi éviter des problèmes comme les décrochages d’onduleurs ou les surtensions. La question partait du constat que les batteries domestiques ou individuelles pourraient ne pas suffire, et donc, une approche collective pourrait être plus efficace.
1. Réponse de Nicolas (ORES) :
Nicolas a répondu en expliquant qu’ORES est soumis à la régulation de la CWaPE, le régulateur wallon de l’énergie, et ne peut pas prendre des décisions comme l’installation de batteries collectives sans son accord. Historiquement, il y avait eu des discussions autour de la mise en place de batteries au niveau des cabines de distribution, mais cela a été refusé par la CWaPE, car ce n’était pas considéré comme faisant partie du rôle d’un gestionnaire de réseau. Nicolas a également ajouté que si une telle initiative voyait le jour, elle nécessiterait des infrastructures beaucoup plus grandes qu’une simple batterie domestique, comparant l’envergure des équipements à celle d’un conteneur maritime.
Il a également mentionné que certaines initiatives pilotes, notamment à Bastogne, avaient vu le jour, où des batteries sont utilisées pour équilibrer la fréquence du réseau (le fameux 50 Hz) grâce à une rémunération via Elia, le gestionnaire de réseau de transport, dans le cadre de la “flexibilité”. Cela permet aux batteries de répondre aux variations de la demande en temps réel.
2. Réponse de Régis François :
Régis François a ensuite pris la parole pour souligner que la gestion des batteries collectives, bien que pertinente, est une question complexe à cause de la flexibilité du réseau. Il a noté que la Flandre est plus avancée dans ce domaine, avec environ 60 000 batteries stationnaires déployées, aidées par des primes et des subventions. Cependant, il a exprimé son scepticisme quant à l’octroi de subventions en Wallonie pour l’installation de batteries, notant que cela pourrait devenir complexe et coûteux.
Régis a comparé les coûts des installations photovoltaïques et de batteries en 2011 et aujourd’hui, illustrant l’évolution des prix, tout en soulignant que les batteries intelligentes pourraient jouer un rôle important dans le lissage de la demande, en stockant l’énergie excédentaire pendant la journée pour la réutiliser le soir, évitant ainsi des pics de demande. Il a aussi mis en garde contre le manque de sensibilisation à la tarification dynamique et ses implications sur les coûts d’électricité, appelant à une meilleure pédagogie et communication pour éviter que les consommateurs ne se retrouvent avec des factures inattendues.
3. Réponse de Koen Bosmans :
Koen Bosmans a apporté une perspective industrielle et pratique, expliquant que pour stocker de l’énergie, il est souvent plus judicieux de le faire de manière collective et d’adapter le type de stockage aux besoins futurs. Par exemple, au lieu de stocker uniquement l’électricité, il est possible de transformer cette énergie en chaleur, qui peut ensuite être stockée à moindre coût. Koen a cité l’exemple de son projet de torréfaction de cacao, où l’énergie excédentaire produite par les panneaux photovoltaïques est stockée sous forme de chaleur dans des cuves à changement de phase, une solution nettement plus économique que le stockage sous forme d’électricité.
Il a conclu en soulignant que le stockage d’énergie à l’échelle d’une maison est souvent insuffisant et qu’il est préférable de penser à des solutions collectives, à plus grande échelle, comme pour les quartiers résidentiels ou les projets industriels.
Le participant a partagé son expérience personnelle sur la manière dont il a réduit sa consommation d’énergie de 40% en renouvelant son électroménager, soulignant que beaucoup de foyers continuent d’utiliser de vieux appareils très énergivores. Il a également posé une question plus large concernant le modèle économique d’ORES et le manque de réinvestissement des bénéfices dans la transition énergétique. Il a suggéré que, contrairement aux intercommunales de la santé qui réinvestissent dans leur secteur, ORES pourrait adopter un modèle similaire en réinvestissant dans l’efficacité énergétique plutôt que de distribuer des dividendes.
Réponse de Nicolas d’ORES :
Nicolas a reconnu la pertinence de la question et a rappelé que la meilleure énergie est celle qui n’est pas consommée. Il a souligné que des actions comme le remplacement des vieux appareils électroménagers par des modèles économes en énergie, ou encore l’isolation des maisons, devraient être des priorités avant même l’installation de panneaux photovoltaïques. Cependant, il a clarifié que le rôle d’ORES est strictement celui de gestionnaire du réseau, en conformité avec le modèle régulé par la CWaPE.
Il a expliqué que, bien que des idées aient déjà été envisagées pour qu’ORES joue un rôle plus actif dans l’efficacité énergétique, la régulation en vigueur impose à ORES d’être un “pure player” qui se concentre uniquement sur la gestion du réseau de distribution. D’autres acteurs comme les communes ou des sociétés spécialisées dans les audits énergétiques ont, selon lui, un rôle plus adapté pour conseiller les consommateurs en matière d’économies d’énergie. ORES, de son côté, a déjà suffisamment de travail avec la gestion des défis liés à l’infrastructure réseau.
La question posée par l’intervenant portait sur la possibilité pour les propriétaires de panneaux photovoltaïques de devenir totalement autonomes du réseau électrique en utilisant des batteries intelligentes. L’intervenant, après avoir écouté les défis auxquels ORES fait face (retards dans la mise à niveau du réseau et l’installation des compteurs intelligents), a suggéré une alternative : permettre à ceux qui disposent de panneaux solaires d’être totalement indépendants du réseau. Il proposait que ces personnes utilisent des batteries pour stocker l’énergie excédentaire et ainsi ne plus être connectées au réseau d’ORES.
Il s’interrogeait également sur l’impact que cela pourrait avoir sur le gestionnaire de réseau, notamment en termes de revenus, et si cela pouvait constituer une solution pour alléger la pression sur le réseau. Il a terminé en disant avec un peu d’humour que sa suggestion « prendrait dans le portefeuille d’ORES », faisant référence aux pertes financières que l’opérateur subirait si de nombreux clients se déconnectaient du réseau.
Réponse de Nicolas d’ORES :
Nicolas a commencé par clarifier la situation d’ORES en soulignant qu’il ne s’agissait pas de difficultés insurmontables, mais plutôt d’un grand volume de travail. Il a mentionné que l’entreprise est en pleine mobilisation pour faire face à ces défis et qu’il existe encore de nombreuses opportunités de recrutement, notamment dans le Brabant wallon.
Il a ensuite expliqué le principe fondamental du réseau : la solidarité et la mutualisation des coûts. Si les personnes les plus aisées, celles qui peuvent se permettre d’investir massivement dans des batteries et des installations photovoltaïques de grande capacité, se déconnectaient du réseau, cela ferait peser tout le poids des coûts d’infrastructure sur les ménages plus modestes, qui n’ont pas les moyens de s’autonomiser. En d’autres termes, la déconnexion des plus riches entraînerait une hausse des coûts pour ceux qui restent connectés au réseau, ce qui remet en question le modèle de solidarité.
Est-il possible de se déconnecter du réseau ?
Nicolas a ensuite abordé la faisabilité technique d’une déconnexion complète du réseau. Il a expliqué que les panneaux photovoltaïques produisent principalement de l’énergie en journée, entre 11h et 17h, tandis que la consommation se concentre généralement en soirée et durant la nuit. Les batteries actuelles permettent de couvrir cette différence de consommation sur un cycle de 24 à 48 heures, mais elles ne peuvent pas gérer les variations saisonnières de production et de consommation. En été, les panneaux produisent bien plus d’énergie que ce qui est consommé, alors qu’en hiver, ils ne produisent pas suffisamment.
En l’absence de réseau, il serait extrêmement coûteux de devenir totalement autonome, notamment en raison des besoins énergétiques en hiver. Nicolas a également souligné que cette autonomie complète serait inabordable pour la plupart des gens et peu réaliste dans le climat belge. Finalement, il a conclu en affirmant que, si augmenter son autoconsommation est une démarche tout à fait réalisable, se déconnecter du réseau n’est ni économiquement viable ni souhaitable dans une optique de solidarité.